Une reprise de la croissance soutenue par un rebond de la consommation des ménages
Après l’absence de croissance en 2023, l’économie a entamé un rebond en 2024, qui devrait se poursuivre en 2025, principalement soutenue par la reprise de la consommation des ménages. Cette reprise est favorisée par la baisse de l’inflation et l’augmentation des salaires sur un marché du travail tendu, qui entraînent une augmentation du pouvoir d’achat et des salaires réels, après deux années de recul. En réponse, la Banque nationale tchèque (CNB) a réduit son taux directeur de 250 points de base entre décembre 2023 et août 2024, le ramenant à 4,5 %. L’inflation devrait rester dans la fourchette cible de la CNB (2 % ± 1 %), ce qui devrait permettre une poursuite du desserrage.
La dépense publique devrait continuer à soutenir la croissance en 2024 et 2025. Elle sera axée sur le secteur de la défense, avec l'achat de 24 avions de combat américains F-35 pour un montant de 150 milliards de couronnes. Le coût des pensions, du fait de l’indexation à l’inflation, et celui du service de la dette, seront également en hausse.. L'investissement, quant à lui, devrait diminuer en 2024, avant de repartir en 2025, porté par les investissements directs étrangers (IDE), dans le cadre de la relocalisation des entreprises européennes et de l’installation d’entreprises chinoises dans la perspective du développement des véhicules électriques. La Facilité pour la reprise et la résilience (FRR) de l’UE, dotée de 9 milliards d’euros jusqu’en 2026, restera un pilier essentiel, en soutenant la transition vers une économie à faible émission de carbone, la transformation numérique, l'amélioration de la qualité de l'administration publique et le renforcement des soins de santé. Le volet REPowerEU, ajouté en octobre 2023, vise à réduire la dépendance du pays aux énergies fossiles. La République tchèque prévoit de cesser d'importer du pétrole russe (58 % des importations de pétrole) d'ici mi-2025, avec l’extension de l’oléoduc transalpin (TAL) qui la relie à l’Allemagne. Un autre objectif est de cesser l'utilisation du charbon d'ici 2033, bien que cela soit vraisemblablement retardé. Par ailleurs, le pays prévoit l'extension de la centrale nucléaire de Dukovany avec la construction de quatre nouveaux réacteurs. L’entreprise coréenne KHNP a remporté l’appel d’offres pour ce projet en juillet 2024.
Les exportations devraient reprendre modestement en 2024, avant, peut-être, d’accélérer en 2025, si leurs principaux marchés manufacturiers européens reprennent. La performance de l'industrie allemande, notamment automobile, pour l’instant modeste, sera déterminante. Parallèlement, les importations devraient aussi augmenter, en 2024, en raison de la reprise de la consommation des ménages, et en 2025, en lien avec la hausse attendue des investissements, notamment pour répondre à une demande accrue en biens d’équipement et en savoir-faire industriel. Malgré cette augmentation des importations, les échanges devraient contribuer positivement à la croissance. La transition vers les véhicules électriques représente un défi majeur pour l’industrie automobile locale, spécialisée dans les véhicules à moteur thermique. Elle nécessitera des investissements substantiels et une requalification significative de la main-d'œuvre. Les constructeurs chinois de véhicules automobiles, soucieux de contourner les nouveaux droits de douane compensateurs instaurés par l’UE, en juillet 2024, (jusqu’à 37,6 %, s’ajoutant à une taxe de 10 %) vont chercher à développer une présence en Europe centrale, pas forcément en république tchèque. Cependant, en mai 2024, Nobo Automotive, filiale du constructeur chinois de camions légers Great Wall Motor, a inauguré une nouvelle usine à ?eské Bud?jovice, destinée à fournir des sièges de voiture pour le constructeur allemand BMW.
Consolidation budgétaire et effacement de l’excédent courant
Le déficit public devrait diminuer en 2024 et 2025 grâce au programme de consolidation budgétaire. Ce programme inclut plusieurs mesures fiscales, telles que l'augmentation du taux d'imposition sur les sociétés de 19 % à 21 %, la réintroduction de la cotisation de 0,6% au titre de l’assurance maladie à la charge des employeurs, le doublement de la taxe foncière, ainsi que l'augmentation des droits d'accise sur l'alcool, le tabac et les jeux de hasard. Les mesures destinées à atténuer l'impact des prix élevés de l'énergie sur les ménages seront progressivement supprimées d'ici fin 2024. Enfin, la dette publique tchèque (dont 27% est extérieure et 11% est libellée en devises étrangères) reste faible par rapport à la moyenne des pays de l'UE.
L’excédent du compte courant devrait presque disparaître en 2024 en raison de l'augmentation des importations générée par la reprise domestique qui réduira l'excédent commercial. En 2025, une reprise, même modeste, des exportations et le renforcement de l'excédent des services, lié à la reprise du tourisme et à la bonne performance des technologies de l’information et de la communication (TIC) compenseront la hausse des importations d’équipements et de savoir-faire industriel, liée à la reprise attendue de l'investissement. Toutefois, l’augmentation des bénéfices rapatriés par les sociétés étrangères liée à la reprise effacera un peu plus l’excédent courant.
Baisse de popularité de la coalition gouvernementale à l’approche des élections législatives, en 2025
Le pays est gouverné par une coalition de cinq partis, menée par Petr Fiala, Président du gouvernement et chef du Parti démocratique civique (ODS), un parti libéral-conservateur. L’ODS, allié de l'Union chrétienne et démocratique-Parti populaire tchécoslovaque (KDU-CSL) et de Top 09 au sein de la coalition Spolu, a formé une alliance avec le parti progressiste Pirate et le parti centriste Mayors. Ensemble, ils contrôlent 108 des 200 sièges à la Chambre des députés. L’opposition se compose du parti populiste ANO, dirigé par le toujours très influent ex-Premier ministre Andrej Babis, qui détient 72 sièges, et du parti de droite radicale Liberté et démocratie directe (SPD), avec 20 sièges. Les prochaines élections législatives sont prévues pour octobre 2025. La popularité du gouvernement a diminué depuis 2023 en raison des mesures d'austérité budgétaire et de la hausse du coût de la vie.. Dans ce contexte, l’ANO gagne en popularité, bien qu'obtenir une majorité sans le soutien de l'extrême droite sera difficile. Lors des élections européennes de juin 2024, l'ANO a remporté le plus de sièges avec 26 % des voix. La coalition Spolu est arrivée en deuxième position, avec un peu plus de 22 % des voix. Au total, les partis de la Coalition gouvernementale ont obtenu le soutien d'environ 37 % de l'électorat.
Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la République tchèque s’est fortement engagée dans le soutien à Kiev, accueillant des réfugiés et fournissant une aide humanitaire et militaire. L’aide a déjà atteint 1,4 milliard de dollars, soit environ 0,5 % du PIB. Par ailleurs, en réponse à la guerre, la République Tchèque a considérablement augmenté ses dépenses de défense, qui devraient atteindre, en 2024, l'objectif de 2 % du PIB fixé par l’OTAN.
En janvier 2024, le président Petr Pavel a renouvelé son appel en faveur de l'adoption de l'euro, soulignant les avantages pour un pays fortement orienté vers le commerce extérieur avec l'UE. Toutefois, il est peu probable que cette adoption se concrétise dans les prochaines années. En effet, la coalition gouvernementale reste divisée sur cette question, avec une majorité de partis favorables, à l'exception notable du Premier ministre Petr Fiala et de son parti, l'ODS. Plus de 70 % de la population s'opposent à l'adoption de l'euro, craignant une hausse des prix. Dans son rapport de convergence 2024, la Commission européenne observe que tous les critères ne sont pas remplis